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Thème 2 : Gouvernance multiniveaux et action publique

Coordination : Xavier Pons et Fabrice Hamelin

Publié le 8 septembre 2008 Mis à jour le 2 octobre 2019

La gouvernance multiniveaux caractérise aujourd'hui l'action publique et les politiques publiques, quel que soit leur objet. Elle devient dès lors un objet d'études en soi, conduisant à privilégier l'analyse des interactions entre les acteurs, dans des champs différents.

Le caractère multi-niveaux de la gouvernance paraît évident si on la définit comme « un ensemble diversifié d'arrangements, une panoplie de systèmes de coordination et de négociation entre entités officiellement indépendantes mais fonctionnellement interdépendantes qui entretiennent entre elles des relations complexes, constamment redéfinies » ou comme le fait Simona Piattoni en parlant de « nouvelles formes interactives de gouvernement dans lesquelles les acteurs privés, les différentes organisations publiques, les groupes ou communautés de citoyens, ou d’autres types d’acteurs, prennent part à la formulation de la politique » . On trouve donc peu de définitions de la « gouvernance multiniveaux » distinctes de celle de la gouvernance dans la littérature officielle comme dans la littérature académique, y compris chez Gary Marks, l’un des premiers à avoir recouru à ce concept forgé pour mieux comprendre le processus de décision dans l’Union européenne. Parler de gouvernance multi-niveaux nous paraît néanmoins particulièrement heuristique, notamment si on se réfère aux définitions qu'en donne son principal concepteur, Gary Marks 

Pour lui en effet (et Liesbet Hooghe), la gouvernance multi-niveaux est « un système de négociation continue entre les gouvernements imbriqués à plusieurs niveaux », dont l’Union européenne est l’incarnation, du niveau local au niveau continental. A ce titre elle constitue une « dispersion de l’autorité de décision à de multiples niveaux territoriaux », soit infranationaux, soit supranationaux, soit les deux, comme dans le cas de l’UE.

On peut dès lors distinguer un premier type de gouvernance multiniveaux recouvrant un système de pouvoirs stables et généraux, à la fois emboités, séparés et identifiables par niveaux. Dans ce type de gouvernance, « chaque citoyen est logé dans une poupée russe aux compétences imbriquées ». C'est dès lors, moins l'indépendance des pouvoirs qui importe que leur interdépendance... qu'ils soient politiques ou administratifs. Il y a là un décentrement de l'analyse qui peut se révéler particulièrement fécond. 

Le second type de gouvernance multiniveaux renvoie à des pouvoirs particuliers, entrecroisés et à géométrie variable. Ils peuvent être spécialisés ou généraux, publics ou privés, infra ou supranationaux. Tous sont imbriqués de multiples manières en faisant intervenir une multiplicité d’acteurs politiques, économiques et sociaux allant de l’Etat au citoyen en passant par les grandes institutions, les élus locaux, les entreprises, la société civile, etc. Une telle représentation de la gouvernance offre là encore de vaste champ à l'analyse des politiques publiques ou de l'action publique.

Abordée ainsi, la notion de gouvernance multiniveaux ouvre en effet de nouvelles perspectives permettant de revisiter un certain nombre de catégories ou de faits sociaux parmi les plus contemporains, dans des domaines et des entrées disciplinaires divers relevant des études du politique.

C’est pourquoi, cette thématique a toute sa place dans les recherches conduites par le LIPHA, dont la vocation est de nourrir l’interdisciplinarité dans les études du politique, comme le permet la notion de gouvernance multiniveaux de plusieurs manières :

- La notion de gouvernance est commune ou potentiellement commune à plusieurs disciplines puisqu’elle est désormais utilisée en sciences politiques, en gestion ou en économie. Elle fait partie du patrimoine des historiens et désormais des juristes. Si ce n’est pas encore le cas de la notion de gouvernance multiniveaux, on formulera ici l’hypothèse qu’elle a sa place dans une perspective interdisciplinaire, ou à tout le moins pluridisciplinaire.

- Une approche thématique de la gouvernance multiniveaux est enrichie en étant transversale et interdisciplinaire. Elle peut aider à modifier la manière d’aborder ou de construire les objets d’étude et à réinterroger la relation entre méthodes et sujets d’analyse. On peut ainsi aborder des objets relevant des domaines de l’emploi, de l’éducation, de la santé, de l’environnement, de la sécurité, des finances publiques autour de la notion de gouvernance multiniveaux en les mettant en relation avec l’analyse des évolutions de de la conduite des politiques publiques, de la démocratie, de l’Etat et des relations internationales.

C'est notamment le sens de l'IDEP 2016, organisé en septembre de cette même année par le LIPHA.